Portrait d’un artisan | Imed Attig, l’Indiana Jones de l’harissa !

Crédits photos: Zied BOUZID – © Copyright mangeonsbien.com


Le patrimoine culinaire tunisien recèle une multitude de produits de terroir dont le développement reste très timide. Parmi les produits phares de la gastronomie tunisienne, on cite l’harissa, une sauce piquante qui accompagne nos mets et apporte une signature unique en son genre.

Malheureusement, ce produit typiquement tunisien demeure orphelin d’une AOC (Appellation d’origine contrôlée) et attend toujours d’être inscrit dans la liste du Patrimoine culturel immatériel (PCI) de l’Unesco.

 

Des coffrets et des pots de l’harissa « Terroirs de Tunisie » (Crédit Photo: Zied BOUZID / © mangeonsbien.com)

 

Devant un tel constat, en 2012, M. Imed ATTIG, président de l’association tunisienne du patrimoine culturel immatériel (ATPCI) a eu l’audace de tenter un pari fou: faire de l’harissa une niche innovatrice en créant la PME « Haroun & Co. » spécialisée dans la fabrication de ce type de sauce piquante, selon une recette traditionnelle, datant de 1952, d’un artisan juif, dénommé Haroun.

 

M. Imed ATTIG, président de l’ATPCI et fondateur de la PME « Haroun & Co. » (Crédit Photo: Zied BOUZID / © mangeonsbien.com)

 

Ainsi, à l’image d’un anthropologue ou d’un messager chargé d’une mission, cet Indiana Jones de l’harissa s’est installé dans la ville de Maâmoura, l’un des fiefs du piment et bastion de la culture paysanne au Cap Bon, pour mettre en exécution une idée très originale: fonder un musée intitulé « La maison de l’Artisan » et surtout développer une gamme d’harissa à travers un large éventail de saveurs et de parfums.

 

 

Mais avant la phase de production, tel un conquistador, ce jeune entrepreneur est parti sur la trace des semences des variétés fixées de la région.

« Dans notre région, nous cultivons trois variétés fixées, dont la meilleure reste celle du « Maâmouri », en référence à la ville de Maâmoura. Il faut dire que l’harissa aurait voyagé avec les juifs mauresques dès le XVIIe siècle jusqu’aux terres tunisiennes, plus précisément le Cap Bon, considéré comme le fief historique de cette spécialité culinaire », souligne M. Attig.

 

 

Sillonnant toutes les bourgades et les villages du Cap Bon, cet aventurier et militant de la culture immatérielle a fini par constituer une banque biologique contenant 12 types de la semence « Maâmouri » de piments (variété fixée et traditionnelle), dont chacune porte le nom de la famille (F) d’agriculteurs qui la cultive:

  • F1: Ben Salem 
  • F2: El Sômai
  • F3: El Kilani
  • F4: Ben Slimaine
  • F5: Doggaz
  • F7: Ben Fraj
  • F8: El Khalai
  • F9: Lahmar
  • F10: El Gharbi
  • F11: El Banay
  • F12: Zayani

Il reste à signaler que ce petit trésor est désormais classé sous l’initiative de cet artisan sur la liste de « Slow food international ».

 

La semence Maâmouri (Crédit Photo: Zied BOUZID / © mangeonsbien.com)

 

Pour ce qui est de la production, à l’image des chercheurs de la cuisine moléculaire, dans son siège social, une maison traditionnelle dont le patio, la cuisine et le « Makhzen« , dit « beit el mouna », (la chambre de stockage des denrées alimentaires) servent à la fois de laboratoire et d’atelier; cet artisan n’a cessé de surprendre avec sa marque « Terroirs de Tunisie » qui compte jusqu’à l’écriture de ces lignes 18 variétés d’harissa:

  • Harissa basique
  • Harissa classique, dite « traditionnelle » (carvi & coriandre)
  • Harissa aux sésames (Hari sésa)
  • Harissa au romarin 
  • Harissa au thym
  • Harissa au cumin
  • Harissa au gingembre 
  • Harissa au fenouil
  • Harissa fumée (smoked harissa)
  • Harissa à la menthe
  • Hrouss (une spécialité gabésienne)
  • Harissa fraîche
  • Harissa cuite à la vapeur à base de piments verts (Hari vert)
  • Salade méchouia
  • Harisset mayou pour préparer la fameuse « ojjet mayou »
  • Tapenade (noir, verte ou pimentée)
  • Pesto pimenté
  • Confiture de prune pimentée

 

Le présentoir des échantillons des produits « Terroirs de Tunisie » à l’entrée de la Maison de l’Artisan à Maâmoura. (Crédit Photo: Zied BOUZID / © mangeonsbien.com)

 

Conditionnée dans des pots en verre de 100 g avec des capsules hermétiques et commercialisée dans des coffrets à trois parfums en carton biodégradable, la marque « Terroirs de Tunisie » est devenue un produit très prisé par les touristes et les expatriés étrangers résidant en Tunisie. Comme quoi, l’opportunité est dans nos produits du terroir !

 

Mme Hayet en train d’éplucher l’ail dans le makhzen (la chambre de stockage des denrées alimentaires) de la Maison de l’Artisan (Crédit Photo: Zied BOUZID / © mangeonsbien.com)

 

Enfin, avec son charme rustique et son décor traditionnel, la Maison de l’Artisan accueille aussi des circuits touristiques (Ex: « Harissa Tour », lors de la 2ème édition du festival du piment et de l’harissa 2016 à Nabeul) où Imed et son bras droit Mme Hayet  proposent à leurs visiteurs des mets du patrimoine culinaire local (Maghmouma, Chakchouka, Felfel bel bsal, Bissara, Salade méchouia, etc.).

 

Unesco
Le stand d’Imed Attig proposant une harissa aux multiples saveurs lors de l’édition précédente du Festival de l’harissa. (Crédits photo: Abdel Aziz HALI / Copyright © mangeonsbien.com)

 

Parallèlement, des séances de dégustation des différents produits « Terroirs de Tunisie » ainsi qu’une démonstration en live du processus de fabrication de l’harissa traditionnelle font partie du programme des visiteurs de ce musée vivant. Quelle sucess story !

 

 


En vidéo: Interview Avec M. Imed ATTIG

 


 

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