Flambée du blé et des céréales: les experts rassurent… Pas de panique !


Pas d’émeutes de la faim à craindre: les experts consultés par l’AFP sont formels, la sécurité alimentaire mondiale n’est pas menacée comme en 2007-2008 ou en 2012 par la flambée des prix du blé due à la sécheresse qui grille les récoltes de céréales cet été en Europe comme en Australie.

Alors que les cours du blé, produit vital et céréale hautement géostratégique, ont touché les 219 euros la tonne sur le marché à terme européen cette semaine, un pic inégalé depuis plus de quatre ans, Nasser Mahamane, économiste à l’Agence des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) à Rome, est serein.

« Le monde sort de plus de quatre années de très bonne production de blé et les indicateurs ne sont pas alarmants, car on dispose de suffisamment de produits pour nourrir la planète », explique-t-il à l’AFP, lors d’un entretien téléphonique.

Il a bien observé « les changements » sur les marchés du blé qui ont gagné 17% entre le 11 juillet et le 10 août, ainsi que les prévisions de récolte à la baisse en Europe et en Australie, principaux pays exportateurs avec les Etats-Unis et le Canada, qui ont affolé les opérateurs. Mais il n’est « pas inquiet ».

 

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Des épis de blé brûlés par le soleil dans un champ près de Magdeburg, le 26 juillet 2018 en Allemagne. (Crédit photo: Tobias SCHWARZ – © AFP)

 

A l’automne 2007, lorsque la flambée des prix des produits alimentaires de première nécessité avait provoqué des troubles sociaux et des violences dans de nombreux pays d’Afrique, d’Asie et du Moyen Orient qui dépendent de l’importation de blé, « notre indice compilant les prix réels des céréales avait grimpé à 232 dollars, or aujourd’hui il n’est qu’à 160,9 dollars », dit-il.

Principale différence, la taille des stocks mondiaux de céréales est très élevée alors qu’ils étaient à un faible niveau en 2007-8, ajoute Peter Thoenes, également économiste à la FAO à Rome.

« Le début de la saison a commencé sur des stocks très élevés », souligne-t-il à l’AFP.

Début juillet, les stocks disponibles permettaient de nourrir la planète « pendant quatre mois et demi », alors qu’ils ne représentaient que « deux mois et demi de consommation » en janvier 2007, selon Arnaud Saulais, analyste chez Starsuppply commodity Brokers, à Nyon en Suisse.

 

– « De mauvais souvenirs » –

Autre différence, les pays importateurs de céréales et les pays exportateurs se parlent. Les marchés et la FAO ont « beaucoup appris » des crises passées, assure Peter Thoenes.

Avec l’initiative « Amis » lancée par la FAO sur recommandation du G20 et de 10 autres organisations intergouvernementales, les pays importateurs et les pays exportateurs sont désormais « autour d’une même table » pour partager leurs prévisions de récolte et réagir ensemble, rappelle-t-il.

N’empêche. Début août, les cours du blé se sont « brutalement » emballés lorsque le marché a cru une rumeur – démentie par la suite – selon laquelle l’Ukraine, l’un des principaux pays exportateurs de blé, allait limiter ses exportations, dit M. Saulais, pour qui « cela rappelle de mauvais souvenirs ».

En 2012, alors que les mauvaises récoltes attisaient les révoltes des Printemps arabes autour de la Méditerranée, les cours du blé avaient brusquement explosé après la fermeture par la Russie de ses exportations, handicapant encore plus les pays dépendant de l’importation, comme le Sénégal, la Mauritanie, le Maroc ou d’autres.

Prenant en compte les effets de la sécheresse, le ministère américain de l’agriculture a confirmé vendredi soir les anticipations du marché en révisant fortement à la baisse ses prévisions de production de blé en Europe pour 2018.

L’UE devrait ainsi produire seulement 137,50 millions de tonnes de blé cette année, au lieu de 145 MT estimé il y a tout juste un mois.

En Allemagne, grillée par la sécheresse, la récolte attendue de céréales devrait tomber à son plus bas niveau depuis 1994, selon les coopératives agricoles.

En revanche, le rapport américain a revu en légère hausse son estimation de production en Russie, à 68 MT contre 67 MT le mois dernier. Bien loin néanmoins du volume historique de blé engrangé l’a passé: 85 millions de tonnes.


 

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