Dans les traditions tunisiennes, le sohlob occupe une place de choix. Il s’agit d’une bouillie de sorgho que l’on consomme en général au petit déjeuner et qui, des années durant, était servie chaude par le personnage haut en couleurs du sohlobgi de chaque quartier.
Arrosé de skanjbir, autrement dit de gingembre, le sohlob est un de ces délices sucrés dont raffolent les Tunisiens. De nos jours encore, quelques sohlobgis continuent à le servir chaud brûlant, dans des bols multicolores, en collation matinale.
Il a fallu Ahmed Ould Ebba pour révolutionner le monde du sohlob! Au début des années 1970, il installa son échoppe à Bab Djedid et proposa le fameux « Djerk ebba« , un sohlob renforcé au miel, à la chamia et aux amandes pilées.
Au fil des ans, la recette s’améliorait au gré de la fantaisie de Ould Ebba. Certaines années, son inspiration décorait le droô de raisins secs. Parfois, il choisissait des fruits secs comme les pistaches et les noisettes.
A chaque inspiration, c’était une recette spéciale qui naissait et les clients qui se pourléchaient les babines contre espèces sonnantes et trébuchantes.
Car, plus le bol était décoré, plus il fallait débourser… Et, Ould Ebba trônait sur son univers juste en face de la porte de Bab Djedid.
La notoriété aidant, le restaurateur adapta au lablabi ses améliorations du droô et là aussi, son imagination allait faire des miracles. On venait littéralement de partout pour goûter aux délices de Sid’Ahmed, surtout la nuit, car le restaurant ne fermait qu’au petit matin.
Au régal des noctambules, ils étaient toujours nombreux jusqu’à ce que l’âge rattrape la légende de Bab Djedid.
Maintenant, le rideau est baissé chez Djerk Ebba… Pourtant, héritage du maître disparu, les sohlobgis de la modernité rivalisent d’audace pour multiplier la richesse nutritive et gustative de ce droô qui continue à rallier les suffrages des gourmets de la cuisine populaire…
Post-scriptum: Cet article est un hommage «au dernier dandy populaire, le précurseur du pop-Art en Tunisie, le créateur de tendances, le roi du marketing gastronomique, le maître absolu du « djerk » et du lablabi nocturne, le prince de Bab Djedid, Ahmed Belkhir, alias Ouled Ebba, disparu la première semaine de ramadan en septembre 2008».
Nota bene: La photo à la UNE est un photomontage de trois clichés: deux anciennes cartes postales illustrant la porte antique de de Bab Djedid et une place de souk de ce célèbre quartier de Tunis (Source Photos: Blog Tunisia Picture) sans oublier une photo de crème de sorgho, dit sohlob (Crédit Photo: Hanene MABROUK).
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Étant gamin, je me rapelle que la première boutique de weld ebba était sise à la rue du riche en bas a l’intérieur de Bab Djedid où il vendait les kaak au besbes et ce qu’on apelle (bachkoutou) et vers 1968. Il ouvre sa célèbre boutique sur la place bab djedid pour vendre du djek_sohlob et du lablabi. Ce fût la belle époque de Tunis et il était concurent d’un autre celebre gargotier HAMADI weld Hanifa (dont le fils perpétue la tradition) début rue bab el Falla sur la place Bab Djazira.
Merci pour cette précision.